Tang Frères vous présente un nouveau programme en partenariat avec Y-2.TV : découvrez chaque semaine une interview au style urbain d'une personne d'origine asiatique et son histoire en France.
Pour ce premier épisode, retrouvez l’animateur télé Raphäl Yem dans une interview humaine et enrichissante, ainsi que le cuisinier Vincent Boccara en fin de vidéo pour un instant cuisine chaleureux !
Cliquez sur la vidéo ci-dessous pour débuter l’aventure ! Nous vous souhaitons un bon visionnage.
Pour information, les produits à l’honneur dans la vidéo :
- Nouilles instantanées saveur oignon
- Nouilles instantanées saveur bœuf
- Bonbons au lait white rabbit
- Bambou en conserve
Pour la sauce sucrée-épicée de Vincent Boccara (sweet chili sauce) :
- Sauce chili légèrement vinaigrée / purée de piment « sambal oelek » (COCK)
- Chili flakes (piment séché en flocons) / piment moulu grossièrement (COCK)
- Vinaigre de riz (COCK)
- Sauce poisson nuoc mam
- Sucre en poudre
- Fécule de pomme de terre
La sauce existe également déjà prête en version bouteille prête à consommer : Sauce au piment pour volailles (烧鸡酱) (COCK)
Interview de Raphäl Yem : transcription de la vidéo
" [Musique]
[Rires]
[Musique]
Sonny Amerie : Salut mon gars !
Raphäl Yem : Sonny comment ça va
S : Tranquille et toi Raphäl ?
R : Mais je suis tellement content d'être avec toi et d'être ici !
S : A quel endroit ?
R : En plus il y’a personne... mais comment vous avez réussi ce braquo !
S : « On a glissé un petit billet... »
R : …dans les petites enveloppes rouges mais oui je vois bien !
S : Bon Raphäl ! Raconte-moi un peu qui tu… moi je sais qui tu es - mais peut-être y'a encore plein de gens qui savent pas qui tu es...
R : Ben je fais plein de choses, je me définis comme un journaliste citoyen, je suis journaliste sans carte de presse, aujourd'hui j'anime des émissions à la télévision française, regardez-moi, à la télévision française...
S : Genre quelles chaînes ?
R : Je suis le visage d'M.T.V. depuis sept saisons déjà, je suis un des visages de B.E.T. (Black Entertainment Channel) …
S : Ça c'est tout nouveau.
R : Comme quoi tu vois, et puis aussi, là je parle plutôt de musique et d'entertainment, mais je fais aussi du débat politique, du débat citoyen, du débat avec les gens...
S : Sur une autre chaîne ?
R : Sur France Ô et la Chaîne parlementaire et Franceinfo, une émission qui s'appelle Flash Talk, depuis trois saisons et qui marche super bien aussi. Donc je fais tout ça.
S : Lourd… ! Sinon t’es de quelle origine ?
R : Alors à ton avis ? Toi tu sais, mais…
S : Attends ! Je cache ça… [NDLR : le nom du pays sur le T shirt de Raphäl] [Rires] Ben t’es Khmer ! Cambodgien, quoi.
R : Moi j’suis Khmer, d’origine Cambodgien, mes deux parents. Souvent les gens croient que je suis métisse : pas du tout ! Mais en fait j’ai cette taille, cette robustesse, cette corpulence… Grâce à la crème fraîche.
S : [Rires]
R : Je dois pas te mentir, frère !
S : Parce qu’on dirait pas que tu viens du Cambodge !
R : Mais bien sûr que oui ! Mais en fait, je suis Normand. En fait, j’ai grandi là-bas, mes deux parents je te disais sont Cambodgiens, sont arrivés du Cambodge en 1975 et…
S : Comme ma famille, pareil.
R : Ah ben tu vois, et puis mais souvent les gens dans la rue m'arrêtent, sont persuadés que je suis Marocain, Algérien, Tunisien, Tahitien, Polynésien donc, Mexicain…
S : C’est vrai que Polynésie, ça peut passer.
R : …Japonais, Cain-ri, Turc
S : [Rires]
R : Nan c'est chaud ! Je t'assure ! Je sais plus quoi dire !
S : Turc, carrément !
R : Mais je t’assure, quand je vais au Maroc les gens ils me parlent arabe normal. Bien sûr !
S : Et du coup t’as quelques mots, ou pas ?
R : Tu veux dire en rebeu ?
S : Pour bluffer !
R : Ah ben bien sûr que oui ! « Salam », « salam alikoum », « bismillah », « hamdoulah » frérot « khouya » bien sûr ! Evidemment.
S : Ici on emploiera plus « sok sabaï », tu vois !
R : Ah, oui ! « sok sabaï », c’est vrai.
[Musique]
S : Comme - je pense - tout le monde qui a l'habitude de venir chez Tang Frères, t’as au moins UNE anecdote sur ton enfance…
R : Mais tu sais quoi c'est un truc de dingue : moi j'ai grandi dans une cité qui s'appelle Hérouville-Saint-Clair en Basse Normandie, et on venait jamais à Paris. Mais quand je dis « jamais » : je crois j'ai vu la tour Eiffel je devais avoir 20 ans quoi ! Et on venait par contre pas à Paris mais dans le 13ème arrondissement de Paris : « Chinatown », on ne venait pas à Paname mais à « Chinatown » peut-être une fois tous les 3 mois…
S : Histoire de faire les courses ?
R : Exactement !
S : Aller faire le plein pour la maison, quoi.
R : Mais vraiment on partait avec la voiture à vide, je me rappelle très bien de ça, on faisait deux heures et demie de route, on arrivait dans les embouteillages, le périphérique un truc incroyable, et le parking souterrain de Tang Frères.
S : Bah toi, tu faisais la queue comme tout le monde…
R : Et à l'époque c'était ça, mais je te parle de ça c'était entre les années 80-90 quoi…
S : Et t’avais quoi, t’avais dix piges ?
R : J'avais un peu moins de 10 ans c’est ça.
S : Ok.
R : Et j'ai un souvenir aussi particulier, c'est que malgré tout il n'y a pas une énorme communauté khmère à Caen.
S : j’imagine, j’imagine…
R : C'était un des endroits où j'entendais parler khmer et je me disais « c’est pas possible, je connais cette langue » !
S : Tu te dis « Ah ? Une tante ? Un cousin ? » [Rires]
R : Mais grave ! Et effectivement en plus je sais pas si les gens le savent mais dans nos langues, rapidement on s'appelle « Tonton », « Tata », « Pou », « Ming », c’est ça, donc …
S : C'est ça. Enfin, « je sais ça », je t'ai dit ça genre bluff mais…
R : Tu connais aussi, quoi.
S : Ouais, j’ai capté.
R : Voilà les sacs de riz ! Mais ça ! Aaah nan, ça c’est petit joueur !
S : Ouais, nan nan, il n'y a pas les gros… ?
R : Mais si, regarde ! Tu vois, c'est ce genre de sac comme ça où tu te casses le dos !
S : Et ça c'est la nouvelle récolte.
R : Ce genre de trucs, enfin encore ils ont du style parce que sinon c’est les sacs… C’est les blancs là comme ça. Et effectivement des fruits et des légumes pas ailleurs… Hé, hé ! Mec je crois que c'est ceux-là en plus !
S : Mais quoi ?
R : Les cartons de mi ! [NDLR : nouilles instantanées]
S : Et oui !
R : Mais QUI, n’a pas…
S : C'était quoi ton préféré ? C'est quoi…
R : Mais c'est le basique, celui-là, là !
S : Non, ça c’est à l'oignon celui-là.
R : Mais c’est le basique ! Le Clásico c'est celui-ci !
S : Non, viens voir, viens voir ! Le Clásico c'est celui-là ! Enfin, maintenant ils ont, tu vois, le packaging est différent, mais…
R : On dirait un packaging de Cain-ri, quand même. […] Il y a un truc je prenais la tête à mes parents à chaque fois pour repartir avec…
S : Pour du sucré ou du salé ?
R : Regarde-moi : du sucré frère !
S : Bon allez sucré, ok.
R : …C’est ça !
S : Oïaïe aïe… !
R : Les bonbons white rabbit ! … On va ouvrir histoire de ter-goû ! Tiens, tiens, tiens, Sadi ! Hop… Nan mais ça… !
S : [Rires] Attends, il y a une technique parce qu'il y a un papier dedans.
R : Y’a un vrai bail, y’a une difficulté : c’est que le bonbon, il se présente comme ça - il est stylé en plus déjà, il a pas changé de packaging - et tu l’ouvres…
S : J’en suis déjà à l’autre étape !
R : et tu as une espèce de pellicule et quand tu es gamin tu sais pas si tu dois la manger ou pas.
S : Moi je la mange !
R : C'est dur, ça pète les dents, mais c’est bon… !
S : De ouf… Mais j'ai fait une overdose après, j'avais arrêté.
R : T’es sérieux ?
S : J'ai pris ma retraite au bout d'un an ! [Rires]
R : Mais c’est tellement de souvenirs, ici regarde par exemple je me rends compte que les pousses de bambou que ma mère achetait il y a 25 ans, c'est le même, il n'a pas changé de packaging !
S : C’est la marque… Enfin, je sais pas si on a le droit de citer la marque… Mais c’est la même image.
R : On est en 2018, changez les frères, un peu !
[extrait vidéo de journal télévisé] A Paris, la colère monte au sein de la communauté chinoise depuis la mort de l'un de ses membres agressé début août à Aubervilliers par trois individus. La dernière en date car le nombre des attaques contre les Chinois, Vietnamiens et Cambodgiens n'a cessé d'augmenter ces dernières années.
R : Là, de plus en plus, on parle aussi des discriminations qui sont faites contre la communauté asiatique.
S : De plus en plus.
R : De plus en plus on se rappelle évidemment de l’affaire de ce gars à Aubervilliers…
S : Ouais, qui s'est fait tuer là.
R : …Qui s'est fait tuer, soupçonné, fantasmé d'avoir des enveloppes de cash sur lui.
S : On va dire, c'est un cliché…
R : C'est un des clichés.
S : …Facile à ressortir.
R : Bien sûr que oui, et qui est faux d'ailleurs : non, je le vois bien, les asiatiques d'aujourd'hui, les nouvelles générations comme vous toutes et nous tous on a des cartes bleues, on a des comptes bancaires, des virements, des PayPal…
S : Y’a pas de cash qui traîne dans les poches !
R : Nan j’ai rien en plus ! Je t’assure je suis le gars qui a jamais de llet-bi de monnaie sur moi ! Et d'ailleurs j'ai participé à un clip : celui des asiatiques de France…
S : Yes ! Où il y avait pas mal de têtes.
R : Il y avait pas mal de têtes, que je suis sûr tu recevras dans ton émission : Fred’ Chau, Emilie Tran, il y avait eu Steve Tran également, des joueurs de foot, des rugbyman…
S : Il y avait comment il s’appelle… Areola
R : Mais aussi tout un tas d'autres personnes, anonymes ou célébrités, d'origine asiatique sans qu'ils ne revendiquent à chaque fois, mais qui on dit « ça y est on est français sans commentaire comme vous, comme ceux qui nous regardent et on n'a pas à subir des discriminations on veut pas revenir en arrière ! » Donc ouais y’a cette image écornée qui traîne d'une communauté tranquille, sans problème, qui a de l'argent, qui est à côté du système français…
S : Mais tu vois ça c'est encore des clichés.
R : Mais un cliché de ouf ! Je suis avec un dépit des meilleurs DJ que je connaisse…
S : Nan, nan… !
R : …qui tourne à travers le monde
[extrait vidéo]
Français.
Français.
Français.
Français.
Français.
Tu peux changer les choses.
Ensemble…
Ensemble, nous pouvons changer les choses.
S : Bon Raphäl y’a un truc qu’aussi j'aimerais aborder avec toi : en tant qu’asiatique, est-ce que tu avais la côte avec les meufs ?
R : Regarde-moi j’avais la côte avec personne ! [Rires] La côte de porc, frère ! Côte de porc laqué, tout ça !
S : Non, non, non, mais : on rigole mais c'est vrai que c'est un point stratégique quand même les meufs ! Parce qu’on n'a pas toujours eu le vent en poupe quand même.
R : Mais de ça, je t'assure j'en ai pas… j'en ai pas souffert !
S : Ah bon ?
R : Je veux dire si je me faisais recaler par une nana c'est - je pense que c'est pas parce que j'étais asiat…
S : Ok !
R : …Au contraire ! mais tu sais de là d’où je viens on n'était déjà pas beaucoup de gens de couleur, de gens je… voilà, je te dis Normandie un peu profonde, cité malgré tout, mais des asiat’ y’en avait très peu… Voilà c'est vraiment en fréquentant Paname et la banlieue parisienne que…
S : Ok. Parce que maintenant Monsieur est papa !
R : Ah ouais ! J'ai une fille magnifique qui va avoir trois ans.
S : Comment elle s’appelle ?
R : Elle s'appelle Iki ! C'est un prénom japonais, japonais le Ki, l'énergie, la force tu sais !
S : Bah Iki comme les Chevaliers du Zodiaque !
R : Et Iki surtout comme le chevalier du Phénix ! [Rires]
[Extrait Les Chevaliers du Zodiaque]
Mais qui es-tu ? Parle !
Je suis Ikki le chevalier phoenix ! la chaleur de tes flammes m’a ranimé ! à présent une deuxième vie s’offre à moi
S : Raphäl !
R : Ouais ?
S : Eh t’as pas oublié de me dire un truc là ??
R : Mais je suis en train de montrer à ma nana, ma femme qui est chef là où je suis voilà tous les produits - voilà chérie ! Tu vois, regarde : on a beau être ici, Tang Frères, supermarché asiatique, et pourtant il y a des produits de tous les pays…
S : Il y a une particularité d'ailleurs qui te concerne, ou la concerne aussi…
R : Bon là comme ça je suis un militant de terrain sur la mixité du coup je suis d'origine cambodgienne, ma femme elle est d'origine algéro cubaine…
S : Ah ouais ?
R : Bah ouais donc ma fille est le mélange de tout ça, et je pense c'est ça l'avenir !
S : C'est une bombe atomique alors ta fille, attention !
R : Ah mais elle va faire des dégâts tu sais hein, oh lala moi je vais être en galère ! Mais je pense que voilà l'avenir c'est ça : le vivre ensemble, la mixité le mélange ! C’est ce qu’on retrouve dans ce magasin j'ai l'impression… Aussi.
S : C'est ça, c’est ça, c'est ça un putain de melting-pot, quoi.
R : De ouf !
[Musique]
(L’instant cuisine par Vincent Boccara)
Vincent Boccara : J'arrive Raphäl
R : Oh la la Vince : Oh la la la la la la…
V : On m’a dit que t’aimais le canard laqué, on m’a dit que t’aimais la sweet chili sauce…
R : Mais c'est ça alors c'est une sauce que je kiffe ! Regarde on dirait une sauce pimentée…
V : C’est ça !
R : Elle est un peu pimentée, mais en fait c'est une sauce sucrée c'est un bonbon quoi ! Tu l’as en bouche. Moi je mets ça sur le riz.
V : J’ai envie de te dire ça tu peux vraiment le mettre partout ! Les Thaïlandais, la sauce sucrée on en mange avec du riz, on le mange avec du poulet, tu l’as même au Mcdo…
R : Sérieux ??
V : T’as des distributeurs de cette sauce là au Mcdo où tu peux prendre pour les frites, et là donc je me suis permis de te la faire avec les produits qu’on a trouvé en magasin : donc tu vois t’as de la sauce chili un petit peu vinaigrée, t’as des chili flakes, ça c’est des piments séchés avec que la peau et les graines, t’as du vinaigre de riz pour un petit peu d’acidité, t’as la sauce poisson – classique, obligé pour les plats asiats, nuoc mam, normal – t’as du sucre basique et de la fécule de pomme de terre.
R : D'accord !
V : Après bon, tu vois la recette elle est très, très simple…
R : Et tu l’as fait… Tu l’as vraiment fait… Tu l'as fait tout seul ! C’est le chef quoi !
V : Goûte, goûte, goûte ! Sens, sens…
R : Vince, Oh lalaaa… Je vais juste…
V : Ça ressemble, hein ?
R : Ouais, il y a la consistance… Mmh, c’est ça. Ah ! Ça pique !
S : Ah moi j’aime bien quand ça pique !
R : Ça pique, c’est sucré ! ça pique, c’est sucré !
V : Et le canard je te l’ai fait revenir un petit peu avec de l’ail avant de te le servir…
R : Oh la la la la la la…
V : Je te laisse taper dedans ! J’ai un autre petit truc pour toi… Tiens, mets un peu ça.
R : Oh oui oui oui oui oui !
V : Toujours du riz gluant pour saucer… Avec tes doigts, avec tes doigts mon gars !
R : Vince j’osais pas là ! J’osais pas faire comme à la maison, tu sais.
V : Chicken sweet chili sauce, c'est la meilleure ! C'est un classique à avoir, un classique à avoir !
R : Bravo Vince.
V : C'est bon ?
R : Merci frérot !
V : Tu repars avec la sauce ?
R : Je repars avec la sauce, hein
V : Le gars il repart même pas avec la mienne quoi ! Il prend la bouteille !
R : [Rires] Mais celle-là je peux pas la mettre dans ma poche !
V : C'est vrai, c’est vrai, c’est vrai…
R : Merci Vince ! ça tue !
V : De rien, de rien ! Rentre bien !
[Musique]"